vendredi 3 décembre 2010

Notice de l'abbé Tresvaux au sujet de M. Riou

La notice de l'abbé Tresvaux n'est ni la plus ancienne, ni la plus détaillée. Elle a le mérite de la concision et d'une certaine sobriété...

Les juges du tribunal de Quimper [...] envoyèrent [...] à l’échafaud, le 16 mars, M. Jean-Etienne Riou, recteur de Lababan. Ce digne pasteur bravait le feu de la persécution pour prendre soin de son troupeau, lorsqu’il fut arrêté au commencement de 1794, et conduit dans les prisons de Quimper. Quelques membres du tribunal, désirant le sauver, voulurent le faire passer pour sexagénaire, afin qu’il pût profiter du bénéfice de la loi, qui exemptait de la déportation les ecclésiastiques parvenus à cet âge. Le président lui-même se prêté à cette tentative de salut, car l’ayant, selon la coutume, interrogé sur son âge, et le confesseur de la foi lui ayant répondu qu’il avait cinquante-neuf ans, « Vous vous trompez, lui répliqua ce magistrat ; car nous avons étudié ensemble ; vous étiez plus âgé que moi, et comme j’ai cinquante-neuf ans et deux ou trois mois, vous devez en avoir soixante. » M. Riou respectait trop la vérité pour se prêter à ce subterfuge ; il déclara qu’il ne les avait pas, et les juges eurent la lâcheté criminelle de prononcer sa sentence de mort, qui fut bientôt exécutée ; il fit paraître beaucoup de courage à ses derniers moments, et se montra digne de la cause sainte pour laquelle il subit le trépas.

Abbé François Tresvaux, Histoire de la persécution révolutionnaire en Bretagne à la fin du XVIIIe siècle, Paris, Impr. D’Adrien le Clère et Cie, 1845, 2 tomes. (tome 1, p. 533-534)